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Dialectique

Posted: juillet 19th, 2009 | Author: | Filed under: Marx, marxisme, matérialisme | Commentaires fermés sur Dialectique

Dialectique. Le mot vient de Hegel, est utilisé par Marx, mais n’est jamais exploré, conceptualisé. Deux choses sont claires à propos de la dialectique chez Marx: il en reprend la structure chez Hegel, mais il lui fait ensuite subir une transformation en se l’appropriant. La phrase d’Engels est célèbre: Marx aurait "trouvé la dialectique" chez Hegel et l’aurait "remise la tête en haut". D’une certaine manière, réfléchir à la dialectique chez Marx revient à se demander dans quelle mesure cette description est littérale ou non.

Chez Hegel, le rôle et le fonctionnement de la dialectique est clair. La dialectique est le mouvement par lequel l’Esprit réalise son développement progressif. Elle fonctionne par la résolution des contradictions internes de cet Esprit. Chaque étape du développement dialectique comporte des contradictions dont le conflit va mener à leur résolution dans une synthèse qui forme le prochaine stade, supérieur, du développement dialectique. Le mouvement dialectique est le processus de perfectionnement de l’Esprit, et est par conséquent le rythme du monde.

En enlevant l’épaisse couche métaphysique qui enveloppe la dialectique hégelienne, Marx extrait une idée simple du concept: l’évolution, le rythme du monde, est donné par les contradictions de ce monde et leurs transformations. A partir de là, le projet politique que va porter Marx est donc logiquement que la destruction du capitalisme ne peut être menée qu’en jouant sur et en travaillant à renforcer ses contradictions propres, jusqu’à son explosion. La destruction du capitalisme est un processus qui prend place au sein même du capitalisme, sans force extérieur venant apporter l’émancipation.

La polémique contre des socialistes de l’époque que Marx qualifie de socialistes utopiques se fait autour de ce point. Ils en appellent à la justice, au besoin humain d’égalité, à une morale universelle comme forces amenant le socialisme, quand Marx voit le socialisme comme une nécessité née du capitalisme même et de son développement. Pour Marx, l’égalité et l’appel à la justice universelle n’ont rien à voir avec le socialisme, et n’en sont en tout cas pas les moteurs.

Dialectique d’Hegel et dialectique de Marx partagent donc une même logique: l’évolution, le temps, est amené par l’affrontement des contradictions. La différence entre les deux dialectiques se fait par ce "voile métaphysique" dont nous avons parlé plus haut: Marx veut sa dialectique matérialiste, en opposition à celle idéaliste d’Hegel.


Tiqqun – décadence du capitalisme

Posted: juillet 18th, 2009 | Author: | Filed under: Tiqqun | Commentaires fermés sur Tiqqun – décadence du capitalisme
[Cet article fait partie de mes notes sur Tiqqun, que c’est bien de lire dans l’ordre, je crois]
Quand une civilisation est ruinée, il lui faut faire faillite. On ne fait pas le ménage dans une maison qui s’écroule.
(Tiqqun n°1, Eh bien, la guerre !)

Une des bases fondamentales de l’analyse de Tiqqun, c’est l’idée de la décadence du capitalisme, l’idée que notre monde actuel, notre monde capitaliste est en bout de course, qu’il "vit à crédit", comme dit plus loin le second texte de Tiqqun n°1. "Civilisation à son terme", "dernier arrêt avant la fin", "ineluctable destruction", les termes abondent dans les textes pour affirmer cette évidence: le capitalisme est à son dernier stade, son stade terminal et il ne fait que s’agiter dans tous les sens pour retarder sa mort. Cette évidence est centrale dans la cohérence théorique des Tiqqun et ce n’est pas un hasard si les deux numéros s’ouvrent tous les deux sur l’affirmation de cette décadence.

Cette décadence est absolue et inguérissable: en effet, elle ne vient pas d’un choix, mais d’une nécessité. Elle a pour origine la réponse du capitalisme à la précédente conflictualité qu’il a eu à affronter, c’est-à-dire la lutte des classes. Pour faire face à la lutte des classes, le capitalisme est devenu Spectacle, c’est-à-dire qu’il est devenu "dictature de la visibilité" (Tiqqun n°1, Thèses sur le Parti Imaginaire). L’idée du capitalisme contemporain comme "société spectaculaire-marchande" est donc reprise de Debord pour décrire la phase actuelle de l’évolution du capitalisme. Dire que le capitalisme est devenu Spectacle, pour Tiqqun, c’est dire qu’on assiste actuellement à la "complète déréalisation du monde" (Tiqqun n°1, Qu’est-ce que la Métaphysique Critique ?).

Pour faire face à la rébellion qu’était le mouvement ouvrier tout au long du vingtième siècle, le capitalisme a colonisé la création, l’art, "toute la sphère du sens, tout le territoire de l’apparence, et finalement aussi, tout le champ de la création imaginaire" (idem). En mettant ainsi sous sa coupe les idées, les imaginaires, jusqu’aux émotions humaines, il pouvait étouffer toute forme de rébellion puisque rien d’autonome par rapport à lui ne pouvait plus exister. Si on ne peut pas réfléchir ou se parler sans passer par une relation capitaliste, comment en sortir ? Tel a été le piège qui a permis d’intégrer le vieux mouvement ouvrier (et donc de le vaincre).

Du simple capitalisme producteur massif de biens matériels, il est donc devenu capitalisme de l’immatériel. Sauf qu’en faisant cela, il a aussi produit la conscience de plus en plus massive de son artificialité, du fait qu’il est un ordre arbitraire, qu’il incarne un monde déterminé qu’on pourrait tout aussi bien décider de remplacer par un autre monde. Les mécanismes de domination le précédant s’appuyaient tous sur une certaine "transcendance" (idem), sur l’idée que des choses étaient fixées, sans qu’on puisse rien y changer, par une ou des puissances qui nous dépassaient totalement (le Dieu chrétien étant un exemple typique). En montrant par l’exemple que tout pouvait potentiellement être produit par l’humanité, le capitalisme a sapé les bases de toute domination, et donc les bases de la sienne. S’il n’y a pas de forces supérieures et que tout est un produit humain, pourquoi ne pas faire les choses d’une manière vraiment différente de celle que l’on pratique actuellement ?

Le dilemne du capitalisme, d’après Tiqqun, est clair: pour répondre à la menace de sa destruction, il a étendu son emprise à toute activité humaine, mais en accomplissant ce tour de force, il a par la même occasion révélé toute activité humaine comme construction, comme artifice, et se retrouve ainsi dans la difficile position d’être un ordre injustifiable par principe, puisqu’il détruit lui-même toute les bases éventuelles qui pourraient servir à le justifier au fur et à mesure qu’il accroît sa domination. Il n’a plus rien à dire pour sa défense, puisqu’il ne peut plus s’appuyer sur rien de solide (solide au sens d’incontestable, de transcendant, comme dit plus haut). Le serpent se mord la queue, et donc le capitalisme ne peut que tourner en rond et se débattre de plus en plus violemment face à sa propre mort certaine.

Le capitalisme est donc actuellement décadent au sens où il ne peut plus que se dégrader, il n’a plus de marge de manoeuvre, et la stratégie qu’il a utilisé pour survivre ne peut que lui garantir un sursis, pas lui permettre de vraiment résoudre son problème. 

Le schéma est donc celui-ci:

  1. le capitalisme, comme tout système de domination, essaie d’écraser ce qui lui résiste. A la phrase précédente de son évolution, il a affronté le mouvement ouvrier, qui le défiait dans les usines, dans les lieux de production des marchandises.
  2. pour priver le mouvement ouvrier de ce qui faisait sa force, le capitalisme l’a privé de toute autonomie, de toute capacité d’exister sans lui, en étendant son emprise à tous les liens humains. Ce mouvement ouvrier s’est par conséquent retrouvé intégré au capitalisme, et donc vaincu.
  3. le monde ainsi produit apparaît maintenant comme complètement artificiel et donc arbitraire, alors qu’il prouve par son existence même qu’il est possible pour l’humanité de produire un monde complet. Dès lors, le capitalisme meurt en tant que système de domination, puisqu’il devient évident qu’il est possible de produire d’autres mondes.

Voilà donc le portrait de la situation actuelle que fait Tiqqun. Mais alors, pour la phase précédente du capitalisme, un mot a été mis sur cette fameuse "conflictualité historique": ce mot c’était la lutte des classes, incarnée par le prolétariat. Pour la phase actuelle, Tiqqun amène un mot nouveau, le "Parti Imaginaire". Ce Parti Imaginaire va constituer mon prochain axe de lecture.


Notes sur Tiqqun

Posted: juillet 18th, 2009 | Author: | Filed under: Tiqqun | Commentaires fermés sur Notes sur Tiqqun

Je fais partie de ces gens qui ont été influencé-e-s par ces deux objets bien particuliers que sont les deux numéro de Tiqqun, une revue théorico-politique. Lentement, graduellement, j’ai été marqué et influencé par les mots, les concepts, quelque chose de la vision du monde tiqqunienne. Pour moi et d’autres personnes, les Tiqqun ont cristallisé des problèmes politiques, dessiné des grilles de lecture du monde, fourni des axes de réflexion et des références, aussi. D’une manière ou d’une autre, sur les chemins de nos pratiques et de nos théories, on passait toujours pas loin de ces livres.

Tiqqun a aussi eu des enfants, des Appel(s), des Insurrection(s), … Pas forcément écrits par les mêmes personnes, ni aux mêmes moments, ces textes s’inscrivent en tout cas dans un même cadre théorique, un même ensemble de positions. C’est ce cadre que j’essaie de regarder dans ce texte, à travers une lecture. Je ne le fais pas pour des raisons théoriques, mais plutôt pour des raisons pratiques, pour cerner et approfondir des divergences et des conflits que je rencontre dans des expériences collectives. En lisant les texte, je veux éclairer des lignes de rupture mouvantes et changeantes que se jouent entre des positions et/ou des collectifs.

L’influence des Tiqqun, c’est d’abord celle d’une perspective: en finir avec la gauche. A un moment où nos chemins semblaient toujours englués dans les contradictions et les échecs de la gauche, réformiste, radicale ou révolutionnaire, les Tiqqun donnaient une nouvelle perspective. Sortir de la gauche, c’était sortir de tout let vocabulaire dont on héritait de nos traditions de luttes: liberté, égalité, émancipation, justice sociale, révolution, peuple, …

Evidemment, sortir de ce vocabulaire impliquait aussi de sortir de tous les concepts, des grilles de lecture du monde héritées par l’intermédiaire de ce vocabulaire. A une époque où beaucoup de gens étaient coincé-e-s entre un vieux trotskysme qui n’en finissait pas de mourir, des vieilles organisations anarchistes pas très folichonnes et dynamiques et l’activisme altermondialiste ou autonome, il semblait intéressant de partir de quelque chose de nouveau, de se payer de nouveaux horizons. Je pense que Tiqqun est tombé à pic à ce moment-ci, et en a bien cristallisé les contradictions. Je crois aussi les Tiqqun ont à la fois créé et participé à construire de nouvelles perspectives à un instant où elles étaient particulièrement nécessaires. Les mots de Ceci n’est pas un programme (Tiqqun n°2), sont particulièrement clairs: il s’agit de "redéfinir la conflictualité historique", au-delà de la lutte des classes, qui n’est plus "opérante".

Les Tiqqun, c’est beaucoup d’écrits plutôt denses, et je vais donc y aller petit à petit pour construire cette lecture. Je vais essayer de fonctionner par grands axes, en écrivant un/des textes sur chaque axe afin d’arriver petit à petit à constituer une lecture cohérente de tous ces écrits; peut-être que c’est un peu scolaire, mais j’ai l’impression que ça évite de s’y perdre (en tout cas, ça m’évite à moi de m’y perdre). Pendant quelques années, les textes dont je vais parler étaient devenus assez difficile à trouver, mais ils ont maintenant été numérisé et mis en ligne sur un site, donc qui veut peut lire ces notes en suivant directement dans les textes.

Une autre chose, c’est que (sauf erreur/oubli/…) je féminise ces notes (et plus largement, les articles de ce blog) alors que les textes originaux parus dans Tiqqun ne sont pas féminisés. J’ai choisi de ne pas modifier les citations de Tiqqun, ce qui fait parfois des mélanges intrigants où un mot apparaît non-féminisé dans une citation juste à côté d’un usage féminisé dans ce que j’écris; c’est pas formidable, mais j’ai trouvé que c’était le meilleur choix. Au passage, une amie avec qui je parlais de ce genre d’histoires m’a fait remarquer que le terme ‘féminiser’, qui est celui qu’on utilise d’habitude, n’est pas génial: ‘féminiser’, ça correspondrait plutôt à prendre l’opposé des règles de grammaires actuelles, et donc à mettre au féminin les situations ambigües, ce qui n’est pas ce qu’on fait d’habitude quand on dit qu’on féminise. Si vous voyez d’autres termes et que ça vous tente de les partager, allez-y.

J’ai dit plus haut que Tiqqun théorisait une rupture entre deux époques. Jusqu’ici, j’ai parlé d’époques de luttes, mais il y a aussi dans ces textes la description de ruptures entre deux phases du capitalisme, les deux ruptures (entre époques de luttes et entre phases du capitalisme) étant assez logiquement liées. L’axe autour duquel je commençerais cette lecture des Tiqqun sera celui de cette nouvelle phase, la décadence du capitalisme.


nous y voilà …

Posted: juillet 17th, 2009 | Author: | Filed under: Murmures | Commentaires fermés sur nous y voilà …

MURMURE, s.m., bruit sourd, plainte sourde: on dit le murmure des peuples, le murmure des eaux.

(Diderot, Encyclopédie)

ce blog est un exercice d’anti-psychiatrie. depuis quelques années la question de l’écriture me trotte dans la tête. écriture politique, écriture théorique, écriture intime; un peu des trois en même temps. d’une certaine manière, j’ai toujours beaucoup écrit dans ma vie: à travers des discussions, à travers des réflexions, à travers des lectures. j’ai toujours beaucoup écrit au sens où j’ai souvent mis en forme et en mot des idées, des images ou des histoires. ça m’apaise, ça soigne mes blessures aussi, ça me donne des envies. d’où ce blog, pour me forçer à écrire plus, et différemment.

au départ, j’ai voulu commencer par des carnets. je n’ai jamais vraiment réussi à écrire avec un carnet, au final. je n’arrive à voir le carnet que comme une gêne, une contrainte dans laquelle je n’arrive pas à me couler.  je me retrouve avec des pages écrites, des morceaux de textes que je n’arrive ni à rassembler, ni à retravailler, et je tombe dans le syndrôme du brouillon, c’est à dire que chaque morceau devient un brouillon d’un texte futur, parfait, définitif, que je finis par ne jamais écrire, ou alors à écrire sans repartir de ces soi-disants brouillons. j’ai envie d’essayer de fonctionner plus par morceaux que je lie les uns aux autres, d’où le blog. pour me forçer à publier aussi, à faire lire mes écritures à d’autres personnes que moi.

murmures dans ma tête que je cherche à faire grandir, murmures du monde que je cherche à entendre plus finement. et puis une voix, ça commence souvent par un murmure.