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Expérience quotidienne de la résistance et de la révolution: un entretien avec Leïla Khaled – introduction

Posted: octobre 10th, 2011 | Author: | Filed under: Traduction(s) | Commentaires fermés sur Expérience quotidienne de la résistance et de la révolution: un entretien avec Leïla Khaled – introduction

Encore une traduction d’un texte qui vient de Jadaliyya ! Cette fois, sans trop d’introduction parce qu’il n’y a plus besoin. Ce sera en plusieurs parties, et avec un peu de chance, j’aurais fini d’ici une semaine.

Expérience quotidienne de la résistance et de la révolution: un entretien avec Leïla Khaled, par Ziad Abu-Rish [en anglais]

Les manifestations et les soulèvements qui se sont emparés du monde arabe ont donné de nouvelles formes aux processus de politisation, ainsi qu’à l’usage du terme « révolution ». Avant 2011, l’emploi du mot « révolution » dans le monde arabe faisait surgir des images de Gamal Abdel Nasser, Abdul Karim Qasim , Mouammar Khadafi, George Habache et Yasser Arafat, parmi d’autres. Pour le dire autrement, « la révolution » et tout que ce mot peut signifier en terme d’espoir, de rêve, d’appartenance, de solidarité et de conflit, appartenait, pour beaucoup de membres de ma génération, à un passé lointain, rendu révolu par ses limites propres et par l’évolution du monde. Même celles et ceux d’entre nous qui considèrent être des gauchistes, des progressistes, des activistes et/ou des militant-e-s pensaient évoluer dans une période et dans un contexte radicalement différent de celui que nos parents, nos mentors, nos modèles et les personnes que nous interrogions décrivaient. En tant qu’historienne de la deuxième moitié du XXème siècle, je suis souvent frappée par le niveau de mobilisation d’une personne lambda dans les années 40, 50 et 60, que ce soit en tant que simple témoin-e des évènements cruciaux de ces décennies ou à travers des appartenances à des partis ou à travers des participations à des manifestations et à des actions de boycott. Un tel degré de politisation offre un contraste fort avec les effets de la dépolitisation et de la démobilisation qui ont traversé le monde arabe après les années 70, quand les gouvernements de l’époque ont consolidé leur emprise et que le nouvel ordre régional et international a été formalisé.

L’itinéraire de Leïla Khaled, une des figures célèbres de la « révolution palestinienne » et une source d’inspiration pour beaucoup, aussi bien à l’époque que depuis, est un exemple parmi des dizaines de milliers d’autres des nombreuses manières par lesquelles des individu-e-s se sont mobilisé-e-s et politisé-e-s à l’époque. Ecouter Leïla Khaled raconter l’histoire de son propre processus de politisation a été un tournant de mon itinéraire politique. Visite après visite, j’ai commencé à comprendre que ce n’était pas sa participation au Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP), ni sa participation au détournement de deux avions (en 1969 et en 1970), qui l’avaient faite telle qu’elle était. Elle a plutôt été politisée et mobilisée par une série d’évènements, de développements et de découvertes datant de bien avant les actes pour lesquels elle est connue. Elle n’est née ni radicale, ni conservatrice.

En cette fin de 2011, Mouammar Khadafi a été ajouté à la liste des dictateurs arabes renversés, tandis que le régime Ba’thiste de Syrie (qui se drape du manteau de « la résistance » et de « l’héritage de la révolution« ) fait face à un défi venu d’en bas plus fort que tout ce à quoi il a eu à faire face jusqu’ici. En Tunisie, en Egypte au Yémen et en Libye, « la révolution » n’est plus un mot venu du passé. C’est une expérience quotidienne, une réalité présente. La « révolution » s’est trouvée beaucoup d’émules, au Moyen-Orient mais aussi au-delà, de Tel-Aviv à Madrid en passant par le Wisconsin. Comme le dit si bien un autre texte [en anglais]: « pour résumer, le monde arabe a retrouvé la politique« . Ni les diverses contradictions de « la révolution » dans ses manifestations locales, ni les luttes qui se profilent pour définir l’étendue et l’héritage de cette révolution ne remettent en cause cette vérité, bien au contraire.

Le monde dans lequel nous vivons à l’heure actuelle est néanmoins très différent, il porte d’autres héritages et est encombré par le poids des révolutions abandonnées et des résistances vaincues. La génération précédente de combattant-e-s de la résistance et de militant-e-s révolutionnaires s’inscrivait dans le contexte des régimes coloniaux et de leur fin, tandis que la génération actuelle s’est construite contre des décennies de régimes autoritaires locaux. De plus, les partis politiques et les régimes aujourd’hui accusés de violer les principes de justice sociale et de libération nationale sont ceux-là mêmes qui se sont construit sur des discours (et, en partie des actes) de révolution sociale et de résistance anti-coloniale. Les processus actuels de mobilisation et de politisation sont donc différents de ceux de la période précédente, et les échecs et les limites des promesses (et des politiques) de la génération précédente pèsent lourdement sur ces processus, leur injectant une dose de scepticisme, de cynisme et de peur de l’inconnu. Malgré tout, une partie beaucoup plus importante que précédemment de la population de la région s’est politisée et mobilisée en 2011. Une nouvelle génération s’approprie « la révolution ».

Ce qui suit est une transcription traduite d’une série d’entretiens que j’ai réalisé avec Leïla Khaled pendant l’été de 2007. Nous avons beaucoup à apprendre d’elle, ainsi que de sa génération de militant-e-s et de révolutionnaires. Tandis que nous nous confrontons aux espoirs, aux rêves, aux exigences et aux stratégies de résistance des soulèvements arabes actuels, je me tourne vers l’expérience de Leïla avec une urgence renouvelée.


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